Le groupe Enterprise comprend le CV Enterprise, les CA Northampton, CA Vincennes, CA Pensacola, DD Phelps et DD Aylwin.
Au 128° T à 8 milles (12 km) de là, le groupe Hornet est composé des unités restantes :
CV Hornet entouré des CA Minneapolis, CA New-Orleans, CL Atlanta, DD Ellet et DD Conyngham.

La flotte navigue à 25 noeuds en adoptant (hors appontages) une navigation en zigzag pour contrer toutes attaques de sous-marins japonais.
D’ailleurs le matin même à 10h36, le DD Phelps a donné l’alerte suite à la détection d’un sous-marin japonais (en fait une fausse alerte) qui a mis la flotte en branlebas de combat avec l’adoption d’un cap d’urgence au 000° avant de revenir quelques minutes plus tard au 270° après une vérification négative.

On comprend mieux l’angoisse des commandants des CV et CA de n’avoir plus que 4 DD pour la chasse ASM…
Toujours du côté de la flotte américaine, au cours de la journée à 14h53, le DD Phelps (toujours lui) va récupérer sur le bâbord de la TF 16, 2 naufragés (pas d’indication sur la nationalité) à bord d’un radeau en caoutchouc (pas d’indication sur la sa couleur – pour rappel : noir IJN, jaune US).

Pour l’heure, la flotte file en direction des croiseurs ennemis sur un nouveau cap au 235° (sud-ouest).

Sur le pont du CV8 Hornet :
A 13h40, sur le pont du CV8 Hornet, 24 SDB Dauntless (8 AF) tous armés d’une bombe de 1000 lb équipées de retardateurs 1/100 sec des VB-8 et VS-8, plus 8 Wildcat (3 AF) du VF-8 sont alignés pour le départ.

Les pilotes sont aidés par les hommes de pont aux gilets verts à s’attacher. Les officiers aux gilets jaunes surveillent les opérations. En arrière les pompiers aux gilets rouges se tiennent prêt à arroser tout incendie de moteur dû à un retour de flammes.
Les pilotes sont tous parés !
Ils ne le savent pas encore mais ils vont participer à la dernière mission de combat de la Bataille de Midway.
13h45, les officiers aux gilets jaunes lancent l’ordre des décollages. Les moteurs rugissent les uns après les autres.

Les Dauntless lourdement chargés s’élancent pour leur dernière mission de combat de cette gigantesque confrontation aéronavale à ce stade de la guerre.
L’ampleur en terme d’effectif sera largement dépassé en 1944 mais les enjeux ne seront pas les même stratégiquement et psychologiquement pour les américains.
L’objectif est de trouver l’une des Task Force japonaises, de l’attaquer au plus tôt pour revenir le plus vite possible auprès de la TF 16.

Toujours cette crainte de se sentir de plus en plus isolé dans le dispositif ennemi avec le risque toujours possible d’une attaque des appareils du CVL Zuiho (la TF 16 est encore hors du rayon d’action de l’île de Wake) ou bien des sous-marins japonais avec une escorte ASM affaiblie.
Les 32 appareils prennent la direction vers la zone des objectifs. Cependant après à peine 20 minutes de vol l’un des Dauntless a des problèmes mécaniques et doit rebrousser chemin pour apponter au plus tôt à 14h02 sur le CV8 Hornet après s’être délesté de sa bombe de 1000 lb.
C’est donc une force d’attaque de 23 Dauntless (8 AF) et 8 Wildcat (3 AF) qui se dirige vers la Task Force japonaise la plus proche.

Les rapports de l’époque ne sont pas très explicites sur une déduction qu’il y a bien que 1 seule flotte japonaise dans le coin et non 2…
Toutefois, nous verrons plus loin que le doute subsiste encore sur la présence ou non d’un cuirassé BB.
Du côté de l’Enterprise :
Pendant ce temps-là, à 14h15, le groupe d’attaque Enterprise commence son appontage sur le CV6.
3 Dauntless se posent sur le CV8 Hornet. 2 de ces Dauntless font partie d’un groupe du Hornet et rejoignent donc leur vaisseau mère.
Le 3e le 6-B-1 de l’Enterprise de son côté ne peut pas attendre plus longtemps dans la ronde d’attente (problème mécanique ou manque de carburant la précision n’est pas indiquée) et se pose au plus vite après autorisation sur le CV8 Hornet
Les appareils sur le pont sont immédiatement transférés dans les hangars via les ascenseurs. Les officiers et sous-officiers des ateliers attendent les ordres : doivent-ils préparer les appareils pour un nouveau raid ?

Pour l’instant seul les chasseurs de la CAP (patrouilles aériennes au-dessus de la Task Force) qui ont eux aussi atterri depuis peu doivent être ravitaillés. Car pour l’instant le tour de CAP est assurée par les chasseurs du CV8 Hornet.
Pour son prochain tour de patrouille le CV6 Enterprise doit mettre à disposition de la CAP 12 Wildcat (4 AF). Ces appareils devront assurer la surveillance de 16h29 jusqu’à 19h.

Détail : sur les 12 appareils, 2 ne vont pas assurer l’intégralité de leur service :
Le 6-F-7 va devoir rentrer au plus vite à 16h44. Son train d’atterrissage ne veut pas se rétracter.
Le 6-F-26 pour sa part obtient l’autorisation pour un atterrissage forcé après des problèmes mécaniques…
En attendant les pilotes de chasse du VF-6 Enterprise dans leur salle de repos s’amuse à raconter les exploits de leur dogtfight. Le moral est bon le VF-6 n’a perdu aucun pilote. Juste 1 Wildcat qui a dû amerrir à court de carburant sur toute la bataille.
Au total les pilotes de chasse du VF-6 peuvent s’enorgueillir d’avoir abattu lors de ces 3 jours les appareils ennemis suivants :
1 bombardier en piqué Val,
1 chasseur hydravion à deux flotteurs (type Jake mal identifié à l’époque comme un type 97),
2 hydravions à flotteur unique (type Pete),
15 chasseurs Zero
4 bombardiers torpilleurs Kate,
1 appareil de type Messerschmitt (à moteur allongé).
On peut imaginer que ce dernier appareil était en fait un des deux bombardiers-torpilleurs Judy Yokosuka D4Y équipé d’un moteur en ligne de 12 cylindres qui étaient à bord du CV Soryu.
Les pilotes de l’aéronavale américaine n’étaient pas habitués à voir des avions japonais équipés d’un tel type de moteur.

Mais laissons les pilotes de chasse discuter entre eux avant de reprendre la routine de la CAP (qui n’aura pas d’incidence sur cette journée du fait de l’absence d’appareils ennemis).
Revenons dans les ateliers du CV6 :
Toujours aucun ordre des « huiles » pour un prochain raid. Donc pour l’instant, seuls les mécaniciens s’affairent autour des Dauntless pour les contrôles mécaniques et changement de pièces nécessaires après ce raid dans le cadre d’un travail machinal.
On peut imaginer que quelques carlingues doivent également être réparées d’impacts de DCA ou de coups d’armes automatiques (pas d’indications sur ce point).

Le Chef de l’armurerie du CV6 Enterprise profite de cette accalmie pour mettre à jour l’état de son stock de munitions. Il notifie les sorties au quotidien des bombes et cartouches qui quittent ses magasins de stockage afin d’avoir une vue exacte.
Sur la ligne « Total » en bas de chaque colonne par calibres, il note les chiffres suivant des munitions dépensées depuis le 4 juin :
Bombes de 1000 lb :57
Bombes de 500 lb : 67
Bombes de 100 lb : 22
Munitions de .50 : 48 280
Munitions de .30 : 40 000
(pas d’indication sur le nombre des torpilles…)
Le CV6 Enterprise (tout comme le CV8 Hornet) reste opérationnel malgré les pertes en appareils soit :
1 Wildcat,
20 Dauntless (le CV6 Enterprise a récupéré une partie des appareils du CV5 Yorktown)
10 Devastator (le capitaine George D. Murray commandant l’Enterprise va insister dans ses rapports pour remplacer au plus vite le Devastator par l’Avenger – nous savons qu’il sera entendu).

Du côté du CV8 Hornet :
Sur le CV8 Hornet, là aussi on commence à faire le bilan de ces 3 jours. Le capitaine Marc A. Mitscher commandant le Hornet a lui aussi demandé l’état de ses effectifs à ses différents subordonnés pour visualiser la situation de son navire.
Du côté des pertes il peut lire les chiffres suivants :
5 Devastator perdu le 4 juin (1 pilote sauvé).
12 Wildcat (6 pilotes sauvés – plusieurs sont tombés à la mer à court de carburant)
5 Dauntless (4 pilotes et 4 mitrailleurs sauvés).

Le VF-8 de Wildcat a abattu pour sa part 3 Zero et 2 Val

Quelques bagarres éclateront dans les bars de Pearl Harbor après le 13 juin (suite au retour de la TF 16) entre les pilotes des Enterprise et Hornet sur les vantardises de certains et l’efficacité des autres.
Idem vis-à-vis des revendications des pilotes de B-17 par rapport aux bombardiers en piqué de l’aéronavale US. Les MP auront fort à faire dans certains cas…
Si le capitaine Marc A. Mitscher (comme le capitaine Murray de l’Enterprise) insiste sur la nécessité d’améliorer le Wildcat par rapport au chasseur japonais Zero, il n’évoque pas les caractéristiques décevantes du torpilleur Devastator.
Par contre il précise à la suite de l’expérience des combats de Midway plusieurs détails tactiques comme l’organisation et le contrôle des CAP par CV et non au sein du commandement de la Task Force dans le cadre de multi-CV au sein du groupe (épineux problème).
Mais également sur un travail de simplification et d’utilisation des appareils de radio embarqués. Les microphones à gorge sont généralement insatisfaisants selon les rapports des pilotes.
En attendant les appareils du Hornet continuent leur vol en direction de la flotte japonaise…
A suivre
